Encore une fois, Haïti est-il en passe de devenir le dindon de la farce à l’OEA ? Par Editor 

Encore une fois, Haïti est-il en passe de devenir le dindon de la farce à l’OEA ?

  • Par Editor 

Les différents acteurs, au sein de l’Organisation des États américains (OE A), s’acharnent à négocier les succès politiques de leurs pays aux dépens des États faibles, ou dont les moyens ne permettent pas de naviguer avec succès les méandres de la politique régionale. Car, dans le cadre de la distribution des commissions, à l’intérieur de cette organisation, les États membres les mieux pourvus financièrement ou diplomatiquement y jouent leur tour. Il semble qu’à ce moment, où la cause d’Haïti est en jeu, des membres se positionnent pour tirer leur épingle du jeu.

En effet, la délégation de l’OEA, dans le cadre de ses bons offices au – près des parties haïtiennes impliquées dans la résolution de la crise, a affirmé avoir eu des discussions avec une cinquantaine de personnes, y compris Jovenel Moïse. Lors de la rencontre avec la délégation, des membres de l’opposition farouchement opposés à la tenue d’élections avec ce dernier au pouvoir ont eu l’occasion d’éclairer la lanterne des visiteurs de l’organisme hémisphérique, par rapport aux actes criminels et aux nombreuses dérives du président de facto. Comme, par exemple, l’appui accordé aux gangs armés par le régime en place, particulièrement l’officialisation du G-9 en famille et Alliés regroupés en fédération de gangs armés reconnue comme organisation de bienfaisance par le ministère des Affaires sociales. À entendre cette révélation, les diplomates de l’OEA ont donné l’impression d’avoir été déconcertés. Ce qui fait penser que le représentant local de l’Organisation des États américains, en Haïti, n’avait jamais pris note de tels agissements du pou voir, encore moins d’en faire un rapport à ses supérieurs. Dans ce cas, la mission de cette délégation au pays revêt une importance capitale, dans la mesure où ses membres se sont véritablement mis à l’écoute des doléances présentées par les membres de l’opposition qu’ils ont rencontrés.

La Mission de l’OEA est entrée au pays muni d’un plan de travail avec les parties prenantes comprenant cinq points autour desquels devaient tourner les négociations. Il s’agit de : 1) Engagement en faveur de la démocratie représentative, en vertu de la Charte démocratique interaméricaine; 2) Engagement pour des élections législatives et présidentielles libres et équitables en 2021; 3) Un processus électoral transparent avec la contribution de toutes les parties prenantes, qui sera crédible pour le peuple haïtien; 4) Accord de compromis pour parvenir à un accord politique au profit du peuple haïtien; et 5) Engagement contre la violence politique et l’impunité en sus de celui relatif au respect des droits humains.

Dans un communiqué émis à la fin de sa mission, la délégation de l’OEA s’est félicitée d’avoir eu l’opportunité d’un dialogue direct avec un « large éventail de parties prenantes et d’un dialogue franc et ouvert ».

De retour au siège de l’organisme hémisphérique, à Washington, elle a fait état de l’œuvre à accomplir : examiner les contributions qu’elle a reçues et, dans un délai de deux semaines soumettre un rapport au président du Conseil permanent, assortit de ses « constatations, conclusions et recommandations ».

Quand bien même les membres de l’opposition dite radicale, liée au secteur démocratique et populaire, ont boudé la Mission de l’OEA, plusieurs acteurs politiques l’ont rencontrée. On peut citer, parmi eux : UNIR de Clarens Renois, AAA de l’ex-sénateur Youri Latortue, l’ancien sénateur Steven Benoit, les représentants du PHTK, le parti ayant porté Jovenel Moï se au pouvoir, MTV-Haïti, de l’homme d’affaires Réginald Boulos, Dirpod, En Avant, de l’ex-député Jerry Tardieu, Opérasyon Tête Ansanm, FND, etc.

Les membres de l’opposition ont profité de l’occasion de mettre les diplomates de l’OEA au parfum, par rapport à ce que représente vraiment Jovenel Moïse et le régime qu’il dirige illégitimement depuis le 7 février. D’aucuns diraient qu’ils ont passé un savon à ces derniers, tant qu’ils ont étalé des faits sur le régime en place. Quant au sénateur Latortue, il a rapporté : « Nous avons plaidé pour une solution à la crise, avec comme premier point, le départ de Jovenel Moïse. Nous avons remis à l’OEA la liste des prisonniers politiques ». Selon Youri Latortue, les réunions avec les émissaires de l’OEA ont donné à l’opposition l’occasion d’informer, à juste titre, les membres de la délégation. Sur tout qu’ils ont reçu des documents relatifs aux nombreux crimes et massacres perpétrés par des sbires du régime PHTKiste, de même que ceux exposant des faits de corruption, ou encore de violations systématiques des droits de l’homme, en sus des maintes infractions de Jovenel Moïse contre la Constitution.

De son côté, l’ex-député Jerry Tardieu, patron du parti En Avant, a affirmé avoir dit aux représentants de l’organisme régional, qu’en aucun cas il n’irait pas aux élections avec Jovenel Moïse au pouvoir. En ce sens il se retrouve sur la même longueur d’onde que le secteur démocratique et populaire ou encore avec le dirigeant de AAA, en plus de tous les secteurs, organisations et entités qui refusent de s’associer, tant au référendum illégal et anticonstitutionnel qu’aux élections faites sur mesure de Jovenel Moïse.

Au moment où l’OEA estime opportun d’intervenir dans la crise multidimensionnelle d’Haïti, les vrais patriotes devraient afficher une même attitude non complaisante par rapport, non seulement à l’organisme régional, mais aussi bien à la communauté internationale, qui se croit autorisée à intervenir, de manière impertinente, dans nos affaires. C’est le cas de l’ambassade des États-Unis, en Haïti, faisant la surenchère eu égard à la déclaration du secrétaire d’État Antony Blinken disant que Washington s’oppose au référendum de Jovenel Moïse, mais encourageant des élections générales en 2021, sans préciser sous quel gouvernement. Une omission intentionnelle, s’agissant de Jovenel Moïse.

Dans cet ordre d’idées, des félicitations sont à l’ordre du jour à Paul Denis et à ses alliés du parti UNIFÒS qui, dans sa réponse à la Mission diplomatique américaine, expose ce que devrait être l’attitude de tous ceux, généralement quelconque, engagés dans la lutte pour chasser, sans délai, le président de facto du Palais national. Dans le communiqué de presse émis par le groupe de M. Denis sont définies les conditions dans lesquelles le peuple haïtien ira aux urnes :

« 1) Quand Jovenel Moïse aura été évacué du palais national; 2) Quand un gouvernement d’entente nationale, issu d’un Accord entre la société civile organisée et les partis politiques de l’opposition, aura pris en charge la gouvernance du pays ; 3) Quand les conditions techniques, politiques et sécuritaires permettront la libre ex – pression des électeurs et l’organisation des élections présidentielles, législatives, communales, libres, équitables et crédibles, dans un environnement apaisé, à travers un processus transparent et inclusif ».

Et le parti Unifòs d’ajouter, dans la même communication : « Il est temps pour la Communauté internationale et les États-Unis d’Amérique de cesser de promouvoir et de supporter la dictature et les régimes pourris en Haïti. Nous exhortons les dirigeants de la grande démocratie que sont les États-Unis d’Amérique à faire coïncider leurs actes aux principes dont ils se réclament ».

Cette posture collective, que devraient assumer tous les patriotes authentiques, est d’autant plus impérative que, d’ores et déjà, des manigances semblent se tramer à l’OEA, au détriment de notre pays. Des informations dignes de foi font croire que le Brésil aurait accepté d’avaliser le référendum de Jovenel Moïse, en contrepartie du vote d’Haïti en sa faveur. Ce pays serait candidat à la présidence de la Commission des droits humains au sein de cette institution.

L’opposition a besoin d’être unie pour faire face à nos ennemis, tant nationaux qu’internationaux. Maintenant, plus que jamais, c’est le moment de nous unir autour des choix proposés par Unifòs afin d’éviter que les magouilles savamment menées au sein de l’OEA ne fassent d’Haïti le dindon de la farce.


cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur VOL. LI, No. 24 New York, édition du 16 juin 2021, et se trouve en P.10 à : H-O 16 juin 2021