Claudy Gassant a-t-il les moyens de sa politique ? par Léo Joseph

CAMPAGNE TOUS AZIMUTS CONTRE LA CORRUPTION, DIT LE NOUVEAU DIRECTEUR DE L’ULCC

  • Claudy Gassant a-t-il les moyens de sa politique ? par Léo Joseph

Une semaine à peine depuis qu’il a été nommé directeur général de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC), Claudy Gassant semble vouloir sonner un son de cloche tout à fait différent de l’attitude adoptée par son patron, par rapport à ce fléau qui, avec la mobilisation des petrochallengers, attire des millions de protestataires dans les rues de la capitale et des villes de province exigeant la démission immédiate et sans condition de Jovenel Moïse. D’entrée de jeu, cette posture de M. Gassant porte à se demander qu’est-ce qui a changé, par rap- port dans la situation du chef de l’État, sinon peut-il se donner les moyens de la politique annoncée. Dans son intervention publique, diffusée aujourd’hui (mardi 10 décembre), il déclare la guerre à la corruption.

Il semble que le nouveau patron de l’ULCC ait l’intention de faire quelque chose, la déclaration qu’il a faite, à l’occasion du jour commémoratif de la journée internationale de la lutte contre la corruption, suggère qu’il a l’intention de frapper très fort sur la table pour démontrer sa volonté de partir « en guerre » contre ce fléau. Son discours suggère qu’il a un mandat. Mais de qui ? On ne saurait croire qu’il a reçu carte blanche de Jovenel Moïse pour avancer dans la direction où sa déclaration semble le pousser. Dans un tel cas, ce serait une volte-face complète de la part du président haïtien.

Prévenir et réprimer la corruption ? Quel « bwa Gasan genyen dèyè bannann ni », qui l’autorise à déclarer la guerre à la corruption, tandis que, depuis des mois son patron fait une opposition farouche aux demandeurs de justice contre les autorités gouvernementales, en tête de liste Jovenel Moïse lui-même, qui ont orchestré le pillage du fonds PétroCaribe et porté bien haut l’étendard de la corruption.

La déclaration anti-corruption de Claudy Gassant a l’allure d’un avertissement. Pas d’équivoque là-dessus. Le message est on ne peut plus direct.

En effet, a déclaré Me Gassant : « L’unité de lutte contre la corruption (ULCC) » tient à réaffirme sa ferme détermination à mettre tout en œuvre, dans les limites de ses attributions légales, pour prévenir et réprimer la corruption sous toutes ses formes. Son éradication s’avère cruciale pour la promotion et l’effectivité d’un service public de qualité au profit de la collectivité ».

Et Claudy Gassant continue d’enfoncer le clou : « En effet, la corruption est un crime, et non un have pour les politiques, les fonctionnaires et les élus en quête de richesses dans des contions illégales. Elle a un impact dévastateur sur la société et particulièrement sur les populations vulnérables. Elle constitue une menace à la croissance, aux opportunités, au développement, à la paix, à la sécurité véritable».

Les effets ravageurs de la corruption Sans biaiser, Me Gassant ajoute : « La mobilisation de l’opinion nationale contre la corruption et ses conséquences, observées, notamment durant les deux dernières années, constitue un témoignage éloquent, une prise de conscience profonde des effets ravageurs de la corruption qui compromet l’avenir des générations présentes ainsi que celui de la postérité »

Et Claudy Gassant de préciser : «En définitive, la corruption gangrène la société haïtienne dans toutes ses composantes; voilà pourquoi l’ULCC doit être omniprésente et proactive pour remplir sa mission de prévention et de répression de la corruption».

Pour terminer M. Gassant donne l’impression d’agiter le gros bâton. Aussi déclare-t-il : «Sous ma direction, l’ULCC s’activera à la mise en place de nouvelles stratégies et s’ouvrira davantage aux autres organismes de l’État (IGF, CNMP, UCREF, entre autres pour une lutte efficace et efficiente ».

À la lumière des déclarations de Claudy Gassant, il importe maintenant de suivre les actes, tant du directeur général de l’UCREF et ceux de Jovenel Moïse. Car après s’être systématiquement opposé à la lutte contre la corruption, ce revirement inopiné du président Moïse en dit long.

Claudy Gassant restera-t-il égal à lui-même ?

Le ton des déclarations faites par Claudy Gassant rappelle celui sur lequel il s’exprimait pour s’opposer à la prestation de serment de Jovenel Moïse, après qu’il eut été proclamé l’élu du scrutin de 2016.

En effet, Me Gassant s’opposait systématiquement à la prestation de serment de Nèg Bannann nan, arguant qu’étant sous le coup d’une inculpation pour blanchiment d’argent, il ne pouvait prendre le pouvoir. Il faut se demander si son opinion a évolué depuis. Sinon, faut-il penser que « la charité bien ordonné commence à la maison»?


cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur, édition du 11 décembre 2019, VOL XXXXIX No.48, et se trouve en P.1, 13, 15 à : http://haiti-observateur.info/wp-content/uploads/2019/12/H-O-11-d%C3%A9cemb-2019.pdf